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Libération. 9 Septembre 2005. Par Stéphane Hessel

A une semaine du sommet exceptionnel qui réunit à New York les chefs d’Etat ou de gouvernement des 192 Etats membres des nations Unies, la question se pose du sens qu’il convient de donner à cette rencontre et des engagements qui peuvent et doivent y être pris.

Soixante ans après l’adoption de la charte qui proclame dans son préambule les valeurs fondamentales à la promotion desquelles l’organisation se consacre, le monde a changé.

L’héritage que le XXe siècle laisse au nôtre est contrasté et le traumatisme qu’il a subi dès le 11 septembre de sa première année, attaque profondément irrationnelle ciblée sur le coeur de ce que nous nommons «civilisation», en a encore obscurci la portée. Nous tâtonnons à la recherche d’un sens.

D’un côté les valeurs proclamées en 1945 au sortir d’Auschwitz et d’Hiroshima, explicitées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, dans les conventions sur le droit humanitaire en 1949, complétées au sommet de la Terre à Rio en 1992 et à la Conférence mondiale des droits de l’homme à Vienne en 1993, restent inscrites dans tous les textes officiels et dans les Constitutions de tous les Etats démocratiques.

De l’autre, aucun siècle n’a connu autant de massacres, de génocides, de dictatures, de violations des droits de l’homme et d’entorses au droit international que le XXe, mais il est aussi celui qui a vu la fin des empires coloniaux, de l’apartheid, du totalitarisme soviétique et l’unification de l’Europe.
Mais surtout l’accélération croissante de la globalisation économique et culturelle, l’explosion des technologies et des moyens de communication ont accentué l’interdépendance qui marque en ce début du XXIe siècle l’ensemble des sociétés humaines.

Le bateau sur lequel nous sommes tous embarqués n’a plus de deck séparé pour les riches et pour les pauvres, pour les Blancs, les Noirs, les Jaunes, pour ceux du Nord et ceux du Sud, pour les nantis et les démunis. Il est essentiel que nous prenions une claire conscience de cette interdépendance, qui exclut tout populisme et impose une forte démocratie mondiale. Or trois phénomènes mettent aujourd’hui cette interdépendance au défi.

Le premier est l’érosion des ressources physiques de la Terre et des richesses culturelles de l’humanité. Avec une rapidité sans frein, nous avons exploité les mers et les forêts, les espèces vivantes et les sous-sols en dépit des cris d’alerte poussés par les écologistes. Presque aussi vite nous avons laissé s’éteindre la diversité culturelle, disparaître des milliers de langues, des centaines de sagesses traditionnelles.

Le deuxième défi est l’explosion scientifique et technologique avec les mutations qu’impose l’ère informatique sans aucune régulation, quant à son impact sur les conditions de vie et ceci non seulement dans le domaine des armements où nous atteignons des potentiels de destruction à faire frémir, mais aussi dans celui des bio et des nanotechnologies, dont le contrôle au nom du plus élémentaire principe de précaution risque de nous échapper.

Le troisième défi est la concentration corporatiste, qui a pris depuis une vingtaine d’années un essor spectaculaire. Mis au service d’une recherche inlassable et hautement compétitive du profit financier, le regroupement entre de moins en moins de mains des leviers de l’économie mondiale laisse les Etats et les sociétés civiles impuissantes à rechercher moins d’inégalités dans la distribution des revenus et plus de sauvegarde des biens publics.

A terme, à court terme, ces trois défis n’épargnent personne : ni les entreprises, ni les savants, ni les techniciens, ni les Etats, ni surtout les citoyens du monde que nous savons être de plus en plus chacun de nous et que seront les prochaines générations.

Ils encadrent de leurs menaces une interdépendance qui réclame de nouvelles formes de solidarité. Car chacun de ces défis peut être relevé par une action décisive et responsable où seraient conjugués les efforts des sociétés civiles de tous les peuples et des Etats démocratiques. Elle donnerait aux institutions mondiales, défenseurs par définition de l’intérêt de tous, les missions et les ressources qui leur permettraient de servir efficacement les valeurs proclamées par la charte.

Après s’être concerté avec les leaders mondiaux réunis à San Francisco par la Fondation Saga le 26 juin date anniversaire de l’adoption de cette charte, le Collegium international (1) propose l’adoption par l’Assemblée générale des Nations unies d’une Déclaration universelle de l’interdépendance qui présente ce terme non comme un constat, mais comme un projet pour un monde plus juste et véritablement solidaire.

Article en ligne : http://www.liberation.fr/page.php?Article=322339

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